Blog consacré aux littératures africaine et caribéenne. En sommeil depuis octobre 2010.

mardi 30 juin 2009

« Aux Etats-Unis d’Afrique », d’Abdourahman A. Waberi


Rarement fiction sur l’Afrique aura aussi bien parlé de l’Europe. Et pour cause : dans Aux Etats-Unis d’Afrique (2006), l’écrivain djiboutien Abdourahman Waberi inverse les rôles, faisant du continent noir le centre économique et intellectuel du monde, tandis que les damnés de la terre se concentrent dans une Euramérique indigente ; partant, il tend un miroir à l’Occident – celui du monde réel.

Dans ce roman, donc, l’Afrique est une fédération d’Etats dont le cœur bat à Asmara (Erythrée), capitale fédérale. Ici, la population se presse dans les restaurants « McDiop » et les salons de café « Sarr Mbock », les rues portent le nom de grandes figures historiques, artistiques et intellectuelles du continent, les immigrés sont traqués férocement. Comme « Yacouba » – un surnom qui dispense de l’appeler par son vrai nom, imprononçable, Maximilien Geoffroy de Saint-Hilaire –, qui a fui sa Suisse natale ravagée par une guerre ethnico-linguistique, ils sont des millions à errer, le regard perdu, dans les rues d’un eldorado utopique.

Et puis il y a Maya, « Malaïka », jeune fille blanche née en Normandie et adoptée, encore bébé, par « Docteur Papa », un médecin ayant sillonné l’Europe au cours de voyages humanitaires. De sa terre natale, elle ne connaît, à l’instar de la majorité des citoyens des Etats-Unis d’Afrique, qu’une chanson, signée de Claude Nougaro : « Armstrong je ne suis pas noir / Je suis blanc de peau / Quand on veut chanter l’espoir / Quel manque de pot »…

Enfant, Malaïka observe avec pudeur, à Asmara, le transparent Yacouba et ses semblables. En grandissant, la voilà qui s’oriente vers une carrière d’artiste – elle fait les Beaux-Arts à Accra (Ghana). De chapitre en chapitre, Abdourahman Waberi papillonne sur des instants fugitifs ou des épisodes plus longs de l’existence de celle qui devient une jeune femme et qui, plus tard, sera amenée à retourner en France, à la recherche de ses racines. Avec beaucoup de lyrisme, il s’attache entre-temps à croquer une civilisation parfois dure et injuste, mais toujours fière d’elle-même et aveugle aux autres. En un mot, nombriliste.

L’écrivain ne cherche pas à montrer à l’Afrique – la vraie – la voie à suivre – sinon celle de l’unité. Les Etats-Unis d’Afrique, tels qu’il les décrit, ne sont ni un idéal à atteindre ni un écueil à éviter à tout prix. Et, par le jeu du miroir, cette absence de jugement manichéen s’applique évidemment à l’Occident. La question n’est pas là. A travers ce roman qui oscille entre science-fiction au présent et parabole poétique, Abdourahman Waberi nous parle, avec un grand talent, d’un monde où rien n’est joué d’avance : un monde perfectible.

Aux Etats-Unis d’Afrique
d’Abdourahman A. Waberi
Jean-Claude Lattès, 2006
233 pages, 15 euros

D'autres chroniques d'Aux Etats-Unis d'Afrique sur les blogs Lecture sans frontières, Les Chats de bibliothèque(s), Bibliotheca...

lundi 29 juin 2009

Biyi Bandele


Biyi Bandele est né en 1967 à Kafanchan, au centre du Nigeria. A 18 ans, il quitte sa ville natale pour la capitale économique, Lagos, et étudie le théâtre à l’université d’Obafemi Awolowo. En 1990, il s’installe à Londres et entame une carrière d’écrivain. Il avait déjà commencé à écrire son premier roman à seulement 14 ans, remporté la compétition internationale étudiante de théâtre à 22 ans et le prix du British Concil Lagos pour un recueil de poèmes non publié à 23 ans. En 1991, il publie son premier roman, L’Homme qui revint du diable, paru en France en 1999. Il réside toujours en Angleterre aujourd’hui.

Célèbre pour ses nombreuses pièces de théâtre comme Two Horsemen (1994) ou Me and the Boys (1995), Biyi Bandele travaille avec de prestigieuses compagnies telles que le Royal Court Theatre ou la Royal Shakespeare Company. En 1997, il a adapté pour la scène le roman de son compatriote Chinua Achebe, Le monde s’effondre (Things Fall Apart, 1958). Il collabore également avec la télévision et la radio en tant que scénariste.

Récompensé en 2000 par l’EMMA (prix média ethnique et multiculturel) de la meilleure pièce pour Oroonoko, il est principalement connu pour ses talents de dramaturge mais pas seulement. Auteur de quatre romans outre-Manche, il s’est fait remarquer grâce à ses textes engagés, teintés de surréel et de poésie.

A lire (en français) :
L’Homme qui revint du diable, Agone, 1999
La Drôle et Triste Histoire du soldat Banana, Grasset, 2009

Photo © Gaël Le Ny

mercredi 24 juin 2009

« La Drôle et Triste Histoire du soldat Banana », de Biyi Bandele


Il est fréquent que l’on ne « rentre » vraiment dans un roman qu’arrivé au premier tiers de l’œuvre, que les premières pages peinent à nous transporter, que l’intrigue mette du temps à se mettre en place et à prendre toute son ampleur. Ce n’est pas le cas de La Drôle et Triste Histoire du soldat Banana (2007), de l’écrivain nigérian Biyi Bandele, qui nous plonge immédiatement dans la chaleur du Caire, alors que la Seconde Guerre mondiale dure déjà depuis deux ans. Dans ce prologue fiévreux, on découvre le général britannique Orde Charles Wingate, qui créera quelques mois plus tard, pour bouter les Japonais hors du Sud-Est asiatique, des groupes de réaction rapide, appelés « Chindits ».

Ali Banana, jeune Nigérian bavard, est un de ces combattants volontaires mobilisés par les Forces alliées pour combattre en « Bimani » au nom de « Lehoua Joj ». Volontaire, mais moins pour se battre que pour suivre ses amis plus vieux, il assomme de paroles et d’histoires les militaires chargés de l’enrôler ou de le mener au front. Cependant, sa verve s’effacera peu à peu – en même temps que la narration enlevée du roman – au fur et à mesure qu’il se rapprochera de la Ville blanche, forteresse assiégée au cœur de la jungle birmane.

De fait, si la rencontre avec Ali Banana à Hailakandi, au Nigeria, haute en couleurs et diablement rythmée, et ses péripéties en Inde, avant de rejoindre sa section, insufflaient une formidable énergie à l’intrigue, celle-ci se met à ronronner une fois arrivé en Birmanie. Ou plutôt à bourdonner, à l’instar des avions japonais qui survolent la jungle, laquelle étouffe l’énergie du départ. Manière de restituer la guerre, qui n’a rien de drôle, où l’homme disparaît derrière le combattant. Les paroles du soldat Banana se font plus rares, la personnalité du héros perd de sa force, s’éteint à l’ombre des autres héros que sont ses camarades de bataille, Nigérians et Britanniques, avançant dans la même galère, vers le même objectif, en direction d’un probable même sort…

« Un livre qui fait résonner, page après page, tout le talent narratif d’un véritable griot », est-il écrit sur la quatrième de couverture de La Drôle et Triste Histoire du soldat Banana. Cette phrase, signée du prix Nobel de littérature Wole Soyinka, reste valable même dans les plus sombres pages du roman. A travers la galerie de portraits des combattants qui accompagnent Ali Banana, Biyi Bandele révèle son merveilleux sens de la narration, truffant leurs histoires respectives de parenthèses, d’anecdotes, à rire ou à pleurer.

Et l’on ne peut que se réjouir qu’en l’espèce, ce sens de l’histoire aille dans le sens de l’Histoire. S’inspirant de personnages historiques réels et des récits de son père qui vécut cette guerre, les arrosant de son imagination débordante, Biyi Bandele évoque dans ce roman un pan peu connu de la Seconde Guerre mondiale, qui vit 500 000 soldats africains servir l'armée britannique au sein de la Royal West African Frontier Force et des King's African Rifles.

Evidemment, beaucoup ne revinrent pas sur le continent natal. Quant à Ali Banana, il se retrouvera bientôt seul, après l’inévitable disparition de nombre de ses frères de combat. A nouveau, il accapare l’attention, il renaît, mais d’une façon qui n’a rien à voir avec le Banana des débuts, changé qu'il est par l'épreuve de la guerre. La fin est drôle et triste. Sublime aussi.

La Drôle et Triste Histoire du soldat Banana
Titre original : Burma Boy (2007)
de Biyi Bandele
traduit de l'anglais (Nigeria) par Dominique Letellier
Grasset, 2009
268 pages, 18,50 euros

mardi 16 juin 2009

André Brink


André Brink est né en 1935 à Vrede, dans l’Etat libre d’Orange, une des quatre anciennes provinces d’Afrique du Sud. Issu d’une famille d’origines danoise et hollandaise, il grandit dans le milieu fermé, traditionnel et austère des Afrikaners calvinistes de province. Son père est juge. Après des études de lettres à la très conservatrice université de Potchefstroom (province du Transvaal), il part pour la France en 1959 et poursuit, deux ans durant, ses études à la Sorbonne.

Le 21 mars 1960, pendant son séjour à Paris, la police sud-africaine tire sur des manifestants à Vereeniging dans le cadre de la campagne nationale des mouvements noirs contre l'obligation du port du passeport intérieur : le massacre de Sharpeville fait 69 morts et près de 200 blessés. « Je suis né sur un banc du Luxembourg, à Paris, au début du printemps 1960 », écrira plus tard André Brink. De fait, une fois rentré dans son pays, il devient l’un des principaux représentants des « Sestigers » (les gens des années soixante), la nouvelle génération d'écrivains afrikaners qui se révoltent avant tout contre les thèmes et les structures éculés du roman de langue afrikaans, avant que la contestation ne s’étende au champ politique. André Brink devient un fervent combattant de l’apartheid.

Son premier acte de résistance a pour nom Au plus noir de la nuit, publié en 1973. Le roman, écrit en afrikaans, est interdit pour pornographie, ce qui pousse André Brink à le traduire en anglais, accédant par là même à une visibilité et une reconnaissance mondiales, confirmées sept ans plus tard avec Une saison blanche et sèche (1979, prix Médicis étranger).

De 1961 à 1990, André Brink à donné des cours à l’université de Rhodes à Grahamstown puis, de 1991 jusqu’à sa retraite en 2005, à l’université du Cap. Aujourd’hui, il vit et écrit au Cap.

A lire (premières éditions françaises) :
Au plus noir de la nuit, Stock, 1976
Une saison blanche et sèche, Stock, 1980
Un instant dans le vent, Stock, 1978
Rumeurs de pluie, Stock, 1979
Un turbulent silence, Stock, 1982
L’Ambassadeur, Stock, 1986
Le Mur de la peste, Stock, 1984
Etats d’urgence, Stock, 1988
Un acte de terreur, Stock, 1992
Adamastor, Stock, 1993
Tout au contraire, Stock, 1994
Les Imaginations du sable, Stock, 1993
Le Vallon du diable, Stock, 1999
Les Droits du désir, Stock, 2001
L’Insecte missionnaire, Actes Sud, 2006
La Porte bleue, Actes Sud, 2007
Dans le miroir
suivi de Appassionata, Actes Sud, 2008
L’Amour et l’Oubli, Actes Sud, 2009

jeudi 11 juin 2009

« Dans le miroir », d’André Brink


Une nouvelle fois, l’écrivain afrikaner André Brink prend le pouls de la société sud-africaine, trente ans après le somptueux roman qui l’avait classé au Panthéon – vivant – des auteurs engagés : Une saison blanche et sèche (1979), œuvre dans laquelle il dénonçait les lois raciales alors en vigueur en Afrique du Sud. A l’heure de la « nation arc-en-ciel », les enjeux ont changé mais, de façon plus insidieuse, la couleur compte toujours.

Dans le miroir (2008), suivi de Appassionata, met en scène des personnages de la classe intellectuelle, bien-pensante, blanche et aisée du Cap – des « bobos » sud-africains. Steve est un architecte qui a « réussi » : talentueux, ambitieux, séducteur. Une femme magnifique – journaliste –, deux fillettes douées – apprenties pianistes –, et une jeune fille au pair alléchante – allemande. Il mène une vie satisfaite, sans aucune remise en question, jusqu’au matin où, dans le miroir de la salle de bain, il découvre que sa peau est devenue noire. Noire, de la tête aux pieds.

Commence alors une journée de doute. Comment les autres vont-ils le percevoir ? comment vont-ils réagir ? au boulot ? à la maison ? Et lui-même ? qui est-il vraiment ? Le simple aperçu de se son reflet éveille en Steve une profonde quête d’identité ; il s’observe, comme au-dehors de lui-même, d’un point de vue dont il ne sait s’il est celui de l’ancien ou du nouveau, du vrai ou du faux Steve, changer d’attitude en fonction de la seule certitude – et encore, en est-il sûr ? – qu’il a changé d’apparence. Lui qui croyait en la « nouvelle Afrique du Sud », celle de la diversité née des cendres de l’apartheid, le voilà qui voit tout sous un jour nouveau.

Dans ce roman, André Brink ne cherche à faire ni le procès ni l’apologie de l’Afrique du Sud post-arpatheid pour laquelle il s’est tant battu. Il se contente, avec subtilité, de soulever un coin d’hypocrisie, de révéler ce qu’on pourrait appeler une « conscience de peau » qui dicte une certaine vision des choses, dans un pays marqué par des années d’une ségrégation raciale radicale – mais serait-ce différent ailleurs ? Il ressort de Dans le miroir une terrible impression de justesse, l’auteur ne forçant jamais le trait – hormis une odieuse et libératrice scène de huis clos où surgissent tous les non-dits enfouis sous la bonne figure de façade de la société blanche.

Dans le miroir est aussi un roman sur l’apparence, l’illusion, le regard, la tromperie. Cet aspect de l’œuvre prend toute son ampleur dans le second récit, Appassionata. Dans le même milieu – toujours blanc, toujours aisé, la touche artistique en plus –, Derek, pianiste d’une cinquantaine d’années, coureur de jupons invétéré, est pris de fascination pour une intouchable soprano, Nina. Histoire d’un amour tourmenté et destructeur, dans laquelle apparaissent parfois les personnages de Dans le miroir, alors que Derek et Nina étaient eux-mêmes évoqués dans le premier récit…

A travers ces chassés-croisés, la vérité se transforme selon qui la raconte – Steve et Derek sont les narrateurs de leurs propres histoires –, au fil des anecdotes, des dialogues et des points de vue. Tout comme le regard de Steve était brouillé par le reflet que lui renvoyait le miroir dans le premier récit, Appassionata sème le trouble dans l’esprit du lecteur, qui ne sait plus à qui se fier. Qu’il se laisse donc guider par ce formidable conteur qu’est André Brink.

Dans le miroir suivi de Appassionata
Titres originaux : Mirror et
Appassionata
d’André Brink
traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Bernard Turle
Actes Sud, 2008
215 p., 20 euros


Lire aussi les impressions d'André Brink à la veille des élections d'avril 2009 en Afrique du Sud, qui ont vu la victoire de Jacob Zuma : "L'immense déception d'André Brink"

Une autre chronique de Dans le miroir sur le blog Les Livres de Nathalie

jeudi 4 juin 2009

Léonora Miano


Léonora Miano est née en 1973 à Douala, ville côtière et capitale économique du Cameroun. Elle y passe son enfance et son adolescence, avant de s’envoler en 1991 pour la France, où elle étudie la littérature anglo-saxonne, à Valenciennes puis à Nanterre. Elle réside toujours en France aujourd’hui.

Entrée précocement en écriture, Léonora Miano a commencé par la poésie avant de se tourner vers le roman à l’adolescence, sans toutefois présenter ses premiers textes à des éditeurs. De fait, elle ne sera pas publiée avant 2005, avec L’Intérieur de la nuit, roman choc dans lequel elle dénonce la barbarie qu’entraînent les guerres civiles en Afrique. Suivront Contours du jour qui vient (2006), récompensé par le prix Goncourt des lycéens, et Tels des astres éteints (2008). Un quatrième roman, Les Aubes écarlates, aborde la question de la traite négrière et vient compléter African Suite, une trilogie commencée avec L’Intérieur de la nuit et Contours du jour qui vient.

Mélomane, Léonora Miano structure ses romans comme des morceaux de musique et parsème son écriture de références discographiques. Sur le fond, l’écrivaine aborde dans ses romans l’identité africaine dans toute sa complexité et ses contradictions. Jusqu’en Europe : ainsi, Afropean Soul est un recueil de nouvelles à forte connotation sociale dans lequel elle se focalise sur les figures des « Afropéens » aux « identités frontalières », avec Paris comme décor.

A lire :
L’Intérieur de la nuit, Plon, 2005
Contours du jour qui vient, Plon, 2006
Tels des astres éteints, Plon, 2008
Les Aubes écarlates, Plon, 2009

Nouvelles :
Afropean Soul et autres nouvelles, Flammarion, 2008
Soulfood équatoriale, Nil Editions, 2009

Photo © Laurent Zabulon / Korava / Abacapress

Sources : Léonora Miano, Evene

lundi 1 juin 2009

« Tels des astres éteints », de Léonora Miano


L’intrigue ne pèse pas bien lourd. Tels des astres éteints (2008) met en scène trois personnages, Amok, Shrapnel et Amandla, qui vivent dans l’intra muros d’une grande ville d’Europe – on pense évidemment à Paris – et se débattent avec leur identité, noire. Ceci étant dit, il ne se passe pas grand-chose qui permettrait de résumer la trame du roman.

Si l’intérêt de Tels des astres éteints n’est donc pas à chercher dans la non-histoire qui y est racontée, il réside par contre dans la façon de la raconter. Léonora Miano prend prétexte des errements intellectuels de ses personnages pour explorer différentes attitudes, différentes façons de vivre sa négritude et son rapport à l’Afrique – jamais nommée ainsi dans le roman – pour des Noirs en Europe.

Amok est issu de la classe dirigeante et aisée d’un pays d’Afrique corrompu. Une origine – sociale – qu’il a choisi de fuir en s’exilant en Europe. Peu à peu, il s’enferme dans l’abattement, l’atonie et la soul music, sans corrompre ses rêves de justice, mais sans rien faire non plus pour leur donner vie.

Shrapnel, son ami d’enfance, moins favorisé, a vu l’arbre centenaire de son village natal abattu par la braderie des terres dans lesquelles il plongeait ses racines. A son tour, il a gagné l’Europe à la recherche de la clé qui lui permettrait de comprendre ce qui a pu fonder la prétendue domination de l’Occident sur l’Afrique. Sur place, il rêve sur fond de hip-hop d’un peuple noir uni de l’Afrique aux Amériques.

Enfin, Amandla a grandi dans un territoire d’outre-mer ; sa mère l’a élevée dans l’adoration de « Kemet », la Terre Mère, celle des pharaons noirs d’Egypte. C’est la plus radicale des trois : elle anime des réunions « kémites » et nourrit le rêve – l’utopie ? –, l’espoir – forcément déçu ? – d’un retour au pays natal.

A travers ces trois portraits, Léonora Miano nous parle d’une Afrique dont les enfants exilés cherchent par différents moyens à redorer le blason, à combattre la honte d’être issu d’une terre aux allures de continent déchu. Cette réflexion, aux airs de manifeste lorsqu’elle est évoquée par le biais de Shrapnel ou Amandla, cette plongée dans le passé et le présent des mouvements identitaires noirs, fait la force de Tels des astres éteints. Mais aussi sa faiblesse : comme je le laissais entendre plus haut, il est dommage – à mon goût – que le fil narratif du roman ne soit pas assez épais pour nous mener sans peine jusqu’au bout de ces 400 pages de dissertation romancée.

Tels des astres éteints
de Léonora Miano
Plon, 2008
409 p., 20 euros


Pour aller plus loin que ce bref résumé, je vous recommande la lecture du décryptage qui est fait de Tels des astres éteints sur le site de Léonora Miano. Ou les chroniques des blogs Dom-Art Livres et Affinités éclectiques.